Défaillances des PME : la santé préoccupante des dirigeants

La santé mentale des dirigeants de PME/TPE est un enjeu souvent sous-estimé dans le monde professionnel. Pourtant, la recrudescence des défaillances d’entreprises peut avoir des conséquences désastreuses sur leur état de santé, notamment psychologiques. Burn-out, dépression, voire suicide sont autant de situations de détresse psychique qui peuvent toucher les patrons en difficulté. Face à ce constat, l’accompagnement et la prévention sont essentiels pour aider les dirigeants à surmonter ces situations.

 

« On parle beaucoup d’inflation et de chiffre d’affaires, mais pas assez de leur santé mentale. Les patrons ne se posent pas la question, ils n’ont pas le temps d’être malades. C’est encore tabou ! »

constate Olivia Grégoire, la Ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme en juillet 2023 au micro de BFM Business.

 

L’inaudible souffrance patronale

Alors que les « gentils » salariés bénéficient d’une écoute assez attentive et surtout obligatoire pour leur sécurité et leur protection au travail, a contrario le « méchant patron » souffre en silence, bien qu’ils dépendent fortement de ce dernier. Le patron doit composer avec une solitude usante, la responsabilité pesante de l’entreprise et ne se donne pas le droit d’être vulnérable. La souffrance au travail des patrons de PME est un phénomène réel, qui nécessite une prise de conscience collective. Selon un article de Souffrance et Travail, les dirigeants sont souvent confrontés à des situations de stress, d’isolement et de surmenage. Près de 20% des chefs d’entreprise qui connaissent la liquidation font une tentative de suicide. L’inflation, la hausse des taux d’intérêt, la baisse de la consommation, le coût des énergies alourdissent le poids des décisions à prendre. Fréquemment isolé face à leurs responsabilités, les risques sur leur santé ne cessent de s’accumuler.

Avec la reprise accélérée des défaillances d’entreprise (près de 58 000 en France en 2023, et environ 6 900 en Auvergne Rhône Alpes, +38% par rapport à 2022 ! source : étude d’Altares), la santé des dirigeants lors de la perte de l’entreprise devrait constituer un sujet majeur. Selon une tribune publiée dans La Tribune, il est important de ne pas stigmatiser les dirigeants en situation de fragilité, mais plutôt de les accompagner dans leur reconstruction. Les aides pour les entrepreneurs en impasse, échec, faillite ou dépression sont nombreuses, comme le souligne un article de Maddyness. Il est essentiel de les informer et de les orienter vers les dispositifs adaptés. Le repli sur soi du patron déprimé anéantit trop souvent ce sursaut pourtant salutaire.

 

Une vie pro-perso impactée

La perte de l’entreprise, leur « bébé », est un événement traumatisant pour les dirigeants qui peuvent se sentir coupables, honteux et isolés. Selon une étude menée par l’Observatoire Amarok (association s’intéressant à la santé des patrons et dirigeants non-salariés de PME), 61% des dirigeants de PME/TPE ont déjà ressenti un état de stress au travail, et 23% ont déjà fait un burn-out. De nombreux entrepreneurs voient leur vie privée impactée par leur vie professionnelle. Et inversement. Tout se mêle : vie privée, vie professionnelle, santé… Le concept des 4D (dépression, divorce, dépôt de bilan et décès) illustre donc bien cette spirale sans fin dans laquelle se placent les entrepreneurs en situation d’échec.

Face à ses conséquences désastreuses, l’accompagnement et la prévention sont essentiels pour aider les dirigeants à surmonter ces situations délicates. Plusieurs associations dont APESA (Aide Psychologique aux Entrepreneurs en Souffrance Aigüe), 60 000 Rebonds proposent une écoute et un soutien psychologique aux chefs d’entreprise en difficulté. Encore faut-il qu’ils ouvrent leur porte à une aide extérieure…

 

Entreprendre est (aussi) bon pour la santé

L’entrepreneuriat peut aussi être bénéfique pour la santé mentale, notamment en cas de handicap. Selon une étude citée dans un article de Handicap.fr, 18 des 20 personnes en situation de handicap anciennement salariées et devenues entrepreneures ont constaté une amélioration de leur santé et de leur bien-être. L’entrepreneuriat peut ainsi être une source d’émotions positives et salutaires (optimisme, persévérance, maîtrise du destin).

« L’entrepreneur est le soldat des temps modernes, le fantassin qui s’engage volontairement pour occuper le front de la guerre économique mondiale. Le seul problème est que l’on a oublié l’infirmerie » conclut Olivier Torres, président de l’Observatoire Amarok. Dans ce voyage émotif qu’est l’entrepreneuriat (Baron 2008), son leader doit s’autoriser à exprimer sa souffrance, se faire accompagner pour transformer son sentiment d’échec et rebondir.

 

Ressources complémentaires

Le portail du rebond : https://portaildurebond.eu

APESA : https://www.apesa-france.com

Association 60 000 rebonds : https://60000rebonds.com

Association Second souffle : https://secondsouffle.org

« La santé du dirigeant : de la souffrance patronale à l’entrepreneuriat salutaire » du collectif dirigé par Olivier Torres, éditions DeBoeck Supérieur

Action soutenue par l’AGEFIPH et le Fonds Social Européen

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